Travaux pour l’extension de la LGV à Manduel vers Montpellier. Un modèle fret-TGV.
T. MONTANER
La Cour des comptes pointe les dérives de la gestion du réseau des Trains à grande vitesse (TGV) dans un rapport qui doit être présenté jeudi prochain. Aucune des six liaisons à grande vitesse citées dans le rapport n'a atteint les objectifs de rentabilité annoncés.
Les établissements publics ferroviaires RFF et SNCF, bientôt réunis, et les politiques français vont recevoir une volée de bois vert de la Cour des Comptes qui dénonce à la fois le forcing pour créer des lignes nouvelles à grande vitesse et l'impréparation de la SNCF à l'arrivée de la concurrence pour les voyageurs.
Le rapport de la Cour, qui sera présenté officiellement le 23 octobre mais dont le contenu a été résumé par Contexte, repris par Le Figaro, affirme que la construction de lignes nouvelles a alourdi la dette du système ferroviaire faute de rentabilité suffisante. La marge opérationnelle des TGV a ainsi chuté de 15 points de 2008 à 2013, de 29 % à 11,4 %.
Compétitivité
La Cour pointe la progression automatique des salaires des cheminots et le surcoût qu’elle entraîne. La dette du ferroviaire public atteint 44 milliards et Fitch pourrait abaisser sa note. « Une situation de grande faiblesse », la concurrence arrivant en 2019 pour les voyageurs.
Par ailleurs, et cela est susceptible de remettre en cause les lignes en projet parmi lesquelles Montpellier-Perpignan, la Cour dénonce des études de rentabilité "systématiquement trop optimistes". La LVG Paris-Lille atteint ainsi 3 % de rentabilité contre 12,9 % prévus. Voici une dizaine d'années, le patron d'Eurotunnel, Richard Shireff, ironisait en disant qu'on pouvait déjeuner sur les voies de la section Lille-Tunnel, tellement la fréquence était faible.
Pour des TER sur les lignes nouvelles
L'incapacité de la France - contrairement au Royaume-Uni - à faire circuler des trains régionaux rapides sur ses voies à grande vitesse est en partie à l'origine de ce manque de rentabilité.
Sur la LGV Méditerranée, le raccordement, à Valence-TGV, vers la ligne de Grenoble et Genève, mis en service l'an dernier, n'est utilisé que par deux TGV par semaine Marseille-Grenoble. Un projet de circulations rapides régionales Alpes-Midi, un temps évoqué, a disparu. Pourtant, la LGV Méditerranée Valence-Marseille-Nîmes affiche 4,1 % de rentabilité contre plus de 8 % prévus.
Sous la présidence de Guillaume Pepy, la SNCF travaille sur un plan TGV destiné précisément à relancer la rentabilité des circulations. Déjà les Ouigo, TGV desservant les gares de périphérie (Marne-la-Vallée, Lyon-Saint-Exupéry), a entraîné une hausse de la fréquentation. Mais seul un modèle plus orienté vers les régions pourra réalimenter le système, avec des TER “GV” comme expérimenté en Nord-Pas de Calais entre Lille et Dunkerque. On aurait ainsi des TER à grande vitesse Lyon-Valence-Ville, Chambéry-Grenoble-Avignon TGV-Avignon-Ville, Marseille-Aix-Montpellier...
La future gare Montpellier-Sud de France en question
Comme pour prévenir les critiques contre le maillon fret-TGV Lyon-Turin que le rapport épingle, Manuel Valls l'a défendu : "Ce projet est bien sûr indispensable. Nous devons pleinement raccrocher l'Italie du Nord, première région industrielle d'Europe, à la France". Reste à savoir si les 8,5 milliards d'euros qu'il coûte ne manqueront pas à l'autre maillon méridional : Montpellier-Perpignan. Quant à l'extravagante et coûteuse gare de Montpellier-Sud de France, 150 M€, isolée et sans correspondance TER, elle pourrait être une belle source d'économie.
GABRIEL LEON Midi Libre