lundi 29 septembre 2014

Lever le tabou de la Constitution

Et si la crise contenait enfin un motif d’espérance? Pour la première fois depuis longtemps, la question des institutions de la Ve République revient dans les conversations.
Le niveau de popularité très faible du président Hollande, les appels ici ou là à une démission, voire une dissolution, alors que le chômage ne se résorbe pas à un niveau très haut bousculent l’omerta qui sert de bouclier aux institutions.
Quel rapport entre la situation économique et la politique? On pourrait répondre par cette question: est-ce qu’un pays systématiquement coupé en deux peut sérieusement se mobiliser pour retrouver le dynamisme économique qui fait défaut, partager l’effort et garantir le progrès social?
L’élection du président de la République dans le cadre des institutions clive, divise, sépare.
La folie cachée de ces institutions est que la moitié du pays pourrait gouverner contre l’autre. Elles furent conçues alors que la France était encore un pays largement rural – les bouilleurs de cru pouvaient faire tomber Mendes France –, l’armée faisait des putschs et quadrillait l’Algérie, la classe ouvrière tenue en lisière. «Il n’y aura plus que les communistes et nous», prophétisait Malraux. C’était il y a mille ans…
Il fallait anéantir le centre parlementaire dominant la IVe et ce fut là tout l’objectif d’une Constitution de combat. Cela a fonctionné, sauf que la sociologie française s’est révélée infiniment plus complexe avec la révolution industrielle, les cols blancs, la jeunesse qui s’est dressée contre cette architecture binaire. Ce furent mai 1968 et le départ contraint du général de Gaulle en 1969.
La gauche s’est parjurée en 1981 en ne changeant rien, mais rien du tout. Mitterrand pour qui la Ve, c’était «le coup d’État permanent» a tout accepté. Certains l’appelaient, il est vrai, Dieu… Peuple caméléon, peuple singe du maître… oublieux de Mendes France, le vrai battu de 1981, pour qui la Ve refoulait la démocratie avec une Assemblée rabaissée, diminuée, matée et un homme en haut qui prétendait tenir lieu d’État, quelle que soit la qualité du titulaire de la charge.
Il faut apprendre à se coaliser lorsque c’est nécessaire, comme en Allemagne, sortir les schémas de guerre civile de nos têtes, assurer la représentation fidèle des citoyens au Parlement.
L’indépendance complète de la justice, une Assemblée des territoires et de la société civile en lieu et place du Sénat (projet de Constitution TC en ligne) sont d’autres nécessités.
Un président arbitre, un Parlement rehaussé et représentatif, des citoyens associés aux choix politiques: il est temps de lever le tabou de la Constitution.

Jean-Pierre Mignard


Retrouver cet edito dans le supplément du 25 septembre de Témoignage Chrétien