jeudi 4 décembre 2014

Ménard : "Ah, mais vous êtes con, vous !"

Guillaume Bonnefont
Le maire a accepté de nous recevoir. Sans langue de bois, mais avec une certaine agressivité.
La Gazette. À plus de six mois de votre élection, quels sont les premiers signes tangibles de votre action ?
Robert Ménard. La baisse des impôts : - 4 % au minimum sur la taxe d’habitation. Depuis plus de dix ans, ça ne faisait qu’augmenter. Deuxième point : une sécurité renforcée. Il y avait 37 policiers municipaux, il y en aura 60 fin janvier. Actuellement, ils sont 13 de plus. Et on va les armer pour qu’ils puissent travailler après 23 h dans les semaines qui viennent.
Et côté économie, qu’avez-vous fait pour améliorer la situation de la ville, qui est dans le rouge ? 
J’ai réduit de 30 % les indemnités de tous les élus. Et de 50 % mes frais de représentation. On a coupé dans les repas offerts pendant la feria et réduit le nombre de voitures. Les départs à la retraite ne sont plus remplacés et les CDD limités. Le budget 2015 sera un budget de rupture qui ne laissera plus filer les dépenses. On va par exemple rationaliser les achats, qui nous coûtent 40 millions d’euros par an: il y a soixante personnes dans la mairie qui sont en droit d’acheter, ça en fait cinquante-neuf de trop.
Cela dit, c’est surtout de vos arrêtés dont on parle dans les médias... 
Ça, c’est le talent journalistique.
Oui, c’est aussi le vôtre...
Je ne vous laisserai pas dire ça. C’est la nullité journalistique, monsieur. La nullité, ça n’a rien à voir avec moi. Je ne vous ai pas demandé de venir. Vous me faites pas le coup "c’est de la com’". Je demande pas aux journalistes de parler de ce que je fais. Je m’adresse aux Biterrois.
Bon, restons calmes. L’arrêté anti-crachats, était-ce bien utile : c’est déjà interdit depuis 1942 ? 
Oui, sauf que c’est oublié, monsieur, c’est pas rappelé. Vous sortez, un peu, vous avez pas vu le nombre de gens qui crachent. Moi, on m’a expliqué à l’école qu’on ne crachait pas dans la cour. C’est parce que les jeunes voient les joueurs de foot cracher à longueur de temps qu’ils pensent que c’est bien.
L’interdiction du linge aux fenêtres ou des paraboles, combien de procès-verbaux ? 
On n’a pas eu à dresser des PV. On a visité une soixantaine d’apparte- ments en demandant aux gens d’en- lever le linge du balcon. Et une cen- taine de paraboles ont été démontées. J’en suis ravi, la ville est plus belle.
Vous cherchez à présent à instaurer la blouse unique dans les écoles. Mais pour l’instant, les conseils d’école refusent. 
J’arriverai à les convaincre. D’ailleurs, les parents sont déjà convaincus. Le problème, c‘est les corps intermédiaires, les syndicats d’enseignants, les fédés de parents d’élève politisées. La blouse, ça gomme les différences sociales. Aujourd’hui, l’uniforme, c’est les marques, selon le portefeuille de papa et maman. Ce n’est pas l’idée que j’ai de l’école de la République.
La messe dans les arènes et le jumelage avec la ville syrienne chrétienne de Maloula choquent les laïques.
Y’a toujours eu une messe dans les arènes pour les VIP, les élus, les journalistes. J’ai voulu une messe pour tous les Biterrois. Défendre les valeurs judéo-chrétiennes de ce pays, c’est une des tâches qui m’incombent. Quant à Maloula, c’est un jumelage éthique. Ça nous changera des jumelages Club Méditerranée que pratiquent nos élus.
Après Zemmour, vous allez faire venir d’autres personnalités qui "libèrent la parole" ? 
De Villiers début décembre. Pour Zemmour, selon le palais des congrès, on était à 1 200 personnes ! Ça dit quelque chose. Pas que sur Béziers, mais sur l’exaspération des gens, leur envie d’affirmer certaines valeurs, l’autorité, l’ordre, la famille.
Le 22 septembre, sur BFM, Marine Le Pen a rendu hommage à "ses"maires, en vous citant. Vous êtes un maire Front national ? 
Je ne ne suis pas au Front National, ni dans aucun parti. Mais vous ne me ferez pas dire des choses désagréables sur Marine Le Pen avec qui je suis en très bons termes. Je partage 80 % de ses idées, comme la majorité des Français – des idées pleines de bon sens. J’ai été 25 ans à RSF. Des leçons sur le souci de l’autre, le respect de l’autre, personne ne pourra m’en donner.
Je ne vous fais pas la leçon...
Au nom de quoi on vient me faire des leçons de morale, avec des questions biaisées et des réponses données en partie ? Encore hier, "Le Petit Journal" de Canal Plus a dit du mal de moi. Et vous savez quoi ? Je les reçois demain matin. Parce qu’à chaque fois que "Le Petit Journal" dit du mal de ce que je fais, ça me rend plus populaire auprès des Biterrois. Comme tous les gens du Midi, ils détestent les Parisiens arrogants.
Avec les arrêtés anti-crachats, anti-linge aux fenêtres, anti-parabole, on a tout de même le sentiment que vous stigmatisez les Arabes.
Ah, mais vous êtes con, vous ! C’est pas ça du tout. Les crachats, c’est les jeunes rappers avec casquette. Vous venez encore me donner des leçons de morale.
Propos recueillis par Olivier Rioux
La Gazette de Montpellier n° 1377 - Du 6 au 12 novembre 2014