samedi 21 mai 2016

REFORME DE L'ETAT Décryptage de la loi NOTRe


Publié le  • Mis à jour le  • Par • dans : Dossiers juridiques
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Troisième et dernier volet de la Réforme territoriale, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notre) a été promulguée le 7 août 2015. Décryptage juridique de cet acte III de la décentralisation.
Cabinet Seban et associés,Avocats
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Réforme territoriale : mettre en oeuvre la loi "Notre"
A l’exception des dispositions de l’article 59 relatives aux modalités d’élection des conseillers de la métropole du Grand Paris censurées par le Conseil constitutionnel par sadécision n°2015-717 du 6 aout 2015, la loi Notre dans sa version définitive est issue de l’accord qui s’est dégagé lors de la commission mixte paritaire le 9 juillet 2015.
Résultat d’un compromis entre le Sénat et l’Assemblée, de l’intervention du scrutin départemental au cours de son examen au Parlement et sur fond de réduction des dotations aux collectivités territoriales, cette loi s’écarte à de nombreux égards, de ses ambitions originelles.
Ainsi en est-il, notamment, du recul opéré sur la suppression des conseils départementaux à l’horizon 2020 qui figurait dans l’exposé des motifs du projet de loi déposé sur le bureau du Sénat le 18 juin 2014.
De la même façon, le principe de l’élection au suffrage universel des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre sans fléchage, selon des modalités fixées par la loi avant le 1er janvier 2017, n’a pas résisté à la négociation avec le Sénat.
Parmi les grands absents de la version définitive du texte, on compte encore le Haut Conseil des Territoires comme instance de dialogue entre le gouvernement et les collectivités territoriales présidé par le Premier Ministre, une nouvelle fois écarté, le Sénat y étant extrêmement hostile.
Le compromis a eu raison, en outre, du durcissement des conditions de blocage du transfert de la compétence PLU à l’intercommunalité telles que définies par la loi Alur souhaité par l’Assemblée nationale ainsi que du chef de filât des régions en matière de tourisme.
L’Assemblée Nationale a obtenu, de son côté, l’approbation par la commission mixte paritaire de la suppression de l’article 12 bis portant création d’un schéma régional des crématoriums, la suppression de l’article 6 bis A tendant à la création de chartes régionales d’aménagement du littoral avec force prescriptive jugées superfétatoires et propres à permettre des divergences d’application de la loi « Littoral », ainsi que la suppression de l’article 24 bis prévoyant la compensation financière par l’Etat, au moyen d’un prélèvement, de la prise en charge par les départements des mineurs isolés étrangers.
Notons enfin que, préalablement à l’intervention de la commission mixte paritaire, de nombreuses autres propositions issues des débats parlementaires et adoptées dans l’une des deux assemblées avaient d’ores et déjà été abandonnées, à l’instar, par exemple, de l’ouverture aux EPCI et aux communes de plus de 10 000 habitants de la possibilité de créer une mission d’information et d’évaluation prévue par l’article L. 2121-22-1 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT).
Le texte n’en comprend pour autant pas moins de 136 articles axés autour de trois parties : une nouvelle définition des compétences portant accroissement du rôle des régions, un renforcement de l’intercommunalité et l’amélioration de la transparence et de la gestion des collectivités territoriales.

La redéfinition des compétences départementales et régionales

Au gré de la navette parlementaire, la répartition des compétences entre les départements et les régions n’a cessé d’évoluer.
Au terme du processus législatif, on pourrait conclure schématiquement que les transferts sont moins nombreux qu’à son origine.
Le retour en arrière sur le transfert des collèges aux régions qui figurait dans le projet de loi à l’article 12 constitue à cet effet l’une des mesures les plus symboliques.
De façon plus précise, il peut être considéré que, dans le cadre d’une spécialisation des compétences des régions et des départements – et donc de la suppression de la clause de compétence générale (CCG) au sein de ces deux collectivités -, les régions héritent de compétences principalement dans le cadre de leur qualité nouvelle de collectivité responsable de la définition « des orientations en matière de développement économique », le domaine des transports subissant en outre des modifications en termes de gouvernance importantes.

La spécialisation des compétences des départements et des régions

Annoncée par François Hollande le 14 janvier 2014 et confirmée par Manuel Valls, dans son discours de politique générale le 8 avril 2014, la suppression de la CCG pour les départements et les régions a été votée aux termes des articles 1ers (pour les Régions) et 94 (pour les Départements) de la loi.
Pour les régions comme pour les départements, la suppression de la CCG n’a été assortie d’aucun délai particulier d’entrée en vigueur.
Les Départements et les Régions sont donc cantonnés à l’exercice des compétences que la loi leur attribue depuis le 9 août 2015.
Notons toutefois qu’il a été prévu des délais d’entrée en vigueur distincts selon les articles ainsi que certains régimes transitoires à l’instar de celui permettant aux conseils départementaux de maintenir les financements accordés aux organismes qu’ils ont créés antérieurement ou auxquels ils participent pour concourir au développement économique de leur territoire jusqu’au 31 décembre 2016.
Il est en outre indiqué, non sans ambiguïté, au sein des dispositions transitoires et finales de la loi, que « sauf disposition contraire, l’exécution des engagements juridiques, financiers et budgétaires pris par les départements et les régions avant la date de publication de la présente loi en dehors des domaines de compétences que la loi leur attribue se poursuit jusqu’au 31 décembre 2015».
Il en résulte donc la possibilité pour les collectivités de poursuivre leurs « engagements » a minima jusqu’au 31 décembre 2015.
Rien ne semble cependant très évident quant à l’avenir de conventions conclues par les départements ou les régions dont le terme est fixé à une date postérieure au 31 décembre 2015, lorsque celles-ci s’inscriront hors du champ de compétence de la collectivité signataire.
La définition de compétences partagées : En dépit de l’ambition de spécialisation des collectivités territoriales, il a été jugé que le caractère transversal de certaines compétences imposait leur exercice partagé.
C’est ainsi que la loi prévoit désormais expressément que « les compétences en matière de culture, de sport, de tourisme, de promotion des langues régionales et d’éducation populaire sont partagées entre les communes, les départements, les régions et les collectivités à statut particulier » (article L. 1111-4 du CGCT).
A cet effet, il a toutefois été prévu en sus (article L. 1111-8-2 du CGCT), que lorsque l’exercice de ces compétences s’opère par le versement d’aides ou de subventions, il puisse être mis en place un guichet unique assumé par l’Etat, une collectivité territoriale ou un EPCI avec lequel les autres personnes publiques concluraient des conventions lui délégant par suite, cette compétence.

Une redéfinition des compétences dans le domaine de la mobilité

La gouvernance en matière de transport et de voirie a incontestablement constitué l’un des sujets les plus sensibles dans l’examen de ce projet de loi Notre.
A l’issue des débats, voici les principales dispositions votées par les deux chambres.
Plusieurs transferts de compétence ont tout d’abord été opérés entre les départements et les régions. A compter du 1er janvier 2017, les régions seront compétentes en lieu et place des départements s’agissant des services non urbains, réguliers ou à la demande (article L. 3111-1 du Code des transports), des transports scolaires (à l’exception toutefois des services de transport spécial des élèves handicapés vers les établissements scolaires qui demeureront à la charge du Département), de la desserte des îles françaises (article L. 5431-1 du Code des transports) ou encore de la construction, l’aménagement et l’exploitation des gares publiques routières de voyageurs relevant du département. Ce dernier transfert ne s’applique toutefois pas pour les Régions Ile-de-France et Rhône-Alpes sur le territoire de la métropole de Lyon.
A noter au demeurant que la loi a procédé à une définition des services de transport urbain et à la substitution de la notion de périmètre de transports urbains qui figurait à l’article L. 1231-2 du code des transports par la notion de ressort territorial des autorités organisatrices de la mobilité.
La loi prévoit en outre que les lignes ferroviaires d’intérêt local gérées par les départements à des fins de transports, que ce soit à des fins de transport de personnes ou de marchandises, seront transférées aux régions dans les 18 mois suivant la promulgation de la loi.
La voirie départementale demeure de la compétence des départements contrairement à ce que prévoyait le projet initial.
Il a par ailleurs été accordé aux présidents de conseils départementaux le même pouvoir d’exécution d’office des travaux aux abords de la voirie départementale située hors agglomération que celui dont disposent les maires pour la voirie communale (article L. 131-7 du Code de la voirie routière).
Il a cependant été introduit une nouvelle disposition à l’article L. 4211-1 du CGCT prévoyant que les régions auront la possibilité de financer les itinéraires routiers d’intérêt régional et identifiés comme tels dans le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET).
D’autres transferts de gouvernance des infrastructures de transport ont également été ouverts, à l’instar de la gestion des ports maritimes et intérieurs qui pourra être transférée des départements aux autres collectivités dans les conditions définies par l’article 22 de la loi Notre, de la propriété des petites lignes de fret ferroviaire qui pourra être transférée par l’Etat à une collectivité territoriale ou à un groupement de collectivités territoriales en application des dispositions modifiées en conséquence de l’article L. 3114-1 du code de la propriété des personnes publiques, ou encore de certains aérodromes qui pourront être transférés par l’Etat aux collectivités qui en auront fait la demande dans les conditions prévues à l’article L. 6311-1 du code des transports.
Enfin, plus généralement en matière de transport, il doit être noté que cette loi a été l’occasion de décider d’un report de neuf mois de l’entrée en vigueur de la réforme de décentralisation et de dépénalisation du stationnement introduite par les articles 63 et 64 de la loi Maptam afin de laisser aux autorités compétentes le temps nécessaire à la mise en place du forfait post/stationnement.
Il a au demeurant été décidé, dans ce cadre, d’habiliter les agents de police municipale et à Paris, les agents de surveillance (ASP), à établir les avis de paiement de forfait de post-stationnement prévus à l’article L. 2333-87 du CGCT.

Le renforcement du rôle des régions

Outre les transferts de compétence dans le domaine des transports, qui viennent d’être détaillés, la loi a accru sensiblement les prérogatives des régions.
La région devient en effet la collectivité territoriale responsable sur son territoire du développement économique et non plus seulement la collectivité cheffe de file de cette compétence.
Dans ce cadre, la région obtient notamment la compétence exclusive pour définir des « régimes d’aides et pour décider de l’octroi des aides aux entreprises dans la région » (article L. 1511-2 du CGCT) ainsi que l’élaboration de deux schémas majeurs prospectifs, couvrant les deux volets du développement économique :
  • le schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (SRDEII), lequel définit les orientations en matière d’aides aux entreprises, de soutien à l’internationalisation et d’aide à l’investissement immobilier et à l’innovation des entreprises;
  • le schéma régional d’aménagement de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET).
La nouveauté de ces schémas, qui viennent se substituer à d’autres préexistants, tient principalement à leur caractère obligatoire et prescriptif vis-à-vis des décisions des autres collectivités.
Les autres collectivités devront notamment prendre en compte les orientations générales du SRADDET dans l’élaboration de leurs documents, notamment d’urbanisme (ex SCOT).
Les actes des collectivités territoriales et de leurs groupements en matière d’aides aux entreprises devront également être compatibles avec le SRDEII.
A noter toutefois, sur ce dernier point, que les métropoles ont obtenu une dérogation leur permettant, en cas de désaccord avec la Région sur le SRDEII, de définir leur propre document d’orientation, lequel devra seulement prendre en compte le schéma régional et non s’y conformer (article L. 4251-17 du CGCT).
Outre ces deux schémas principaux, il doit être noté que les régions se voient également confier l’élaboration d’un plan régional de prévention et de gestion des déchets dans les conditions nouvellement définies aux articles L. 541-13 et suivants du code de l’environnement.
Dans un tout autre secteur, il est encore créé un schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation qui aura pour objet de définir les orientations de la région et les priorités de ses interventions dans ce domaine (article L. 214-2 du code de l’éducation).
A noter enfin que l’organisation du service public de l’emploi a fait l’objet de nombreux débats, le Sénat ayant notamment proposé à deux reprises qu’il soit confié à la région la coordination de ce service public.
Finalement, la loi inscrit uniquement le principe d’une participation de la région à la coordination des intervenants du service public de l’emploi, sans préjudice des missions confiées à l’Etat.
En outre, s’il a également été prévu la possibilité d’une expérimentation de la coordination, par la région sur délégation de l’Etat, de certains acteurs de l’accompagnement à l’emploi aux termes des dispositions d’un nouvel article L. 5311-1 du CGCT (notamment les missions locales, PLIE, maisons de l’emploi et Cap emploi), il doit être noté que ces expérimentations excluent toutefois un acteur majeur : Pôle emploi.
Dans ces conditions, il peut paraître un peu présomptueux de percevoir véritablement une première étape dans la décentralisation de ce service public de l’emploi .
Le département demeure, quant à lui, la collectivité compétente pour promouvoir les solidarités et la cohésion territoriale.
Dans les conditions définies à l’article L. 1111-10 du CGCT, il conserve la possibilité de contribuer au financement de certains projets dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les communes ou leurs groupements (notamment les opérations d’investissement en service d’investissement en milieu rural).
Il est également confié aux départements l’élaboration avec l’Etat d’un schéma départemental d’amélioration de l’accessibilité des services, voué à définir un programme d’actions pour une durée de six ans destiné au développement de l’offre de services dans les zones présentant un déficit d’accessibilité.
Notons au demeurant que c’est dans le respect des prescriptions de ce schéma que pourront être implantées les maisons de services au public créées également par la loi Notre en remplacement des maisons de service public.

Le renforcement de l’intercommunalité

Evolution des périmètres des intercommunalités

L’article 33 de la loi Notre relève le seuil minimal de constitution d’un EPCI à fiscalité propre. Le projet initial proposait de le relever de 5 000 à 20 000 habitants (sauf exceptions géographiques particulières) ; après avoir été largement discuté lors des débats parlementaires a finalement été adopté un seuil à 15 000 habitants.
Ce principe est assorti d’un ensemble de modulations permettant de l’adapter à la diversité et à la réalité des territoires dans plusieurs hypothèses (sans toutefois pouvoir envisager un EPCI inférieur à 5000 habitants) :
  • pour les EPCI (ou projets d’EPCI) « dont la densité démographique est inférieure à la moitié de la densité nationale, au sein d’un département dont la densité démographique est inférieure à la densité nationale ; le seuil démographique applicable est alors déterminé en pondérant le nombre de 15 000 habitants par le rapport entre la densité démographique du département auquel appartiennent la majorité des communes du périmètre et la densité nationale » ;
  • pour les EPCI (ou projets d’EPCI) dont la densité démographique est inférieure à 30 % de la densité nationale ;
  • pour les EPCI (ou projets d’EPCI) comprenant une moitié au moins de communes situées dans une zone de montagne ou regroupant toutes les communes composant un territoire insulaire ;
  • pour les EPCI (ou projets d’EPCI) incluant la totalité d’un EPCI à fiscalité propre de plus de 12 000 habitants issu d’une fusion intervenue entre le 1er janvier 2012 et la date de publication de la loi Notre).
Le même article 33 a procédé à un report de la date de révision des schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI) au 31 mars 2016, un délai de consultation des communes et de la CDCI raccourci d’un mois.
En outre, le contenu des SDCI a été approfondi par la prise en compte, dans le cadre de leur élaboration, d’un état des lieux de la répartition des compétences des groupements existants et de leur exercice.
A cela s’ajoute que le législateur a réitéré le souhait de réduire le nombre de structures intercommunales notamment par la reformulation de l’objectif de réduction du nombre de syndicats.
Ces dispositions sont complétées par les articles 37 et 40 qui énoncent les procédures de mise en œuvre par le préfet de ces schémas s’agissant des évolutions de périmètre, d’une part, des EPCI à fiscalité propre, d’autre part, des syndicats. De même, l’article 47 de la loi amende l’article 11 de la loi Maptam consacré à la procédure de mise en œuvre du schéma régional de coopération intercommunale (SRCI) applicable en grande couronne.
Notons enfin que l’article 45 de la loi réintroduit un article L. 5210-1-2, relatif à la procédure d’intégration d’office de communes dites « isolées » dans un EPCI à fiscalité propre, le précédent dispositif ayant été censuré par le conseil constitutionnel (Décision n° 2014 – 391 QPC du 25 avril 2014).

Le transfert de nouvelles compétences aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération

La loi renforce le degré d’intégration des communautés de communes et des communautés d’agglomération en leur attribuant de nouvelles compétences, celles des communautés urbaines et des métropoles ayant déjà été étoffées par la loi Maptam.
La loi prévoit ainsi pour l’une et l’autre de ces communautés le transfert d’une compétence optionnelle en matière de création et de gestion de maisons de services au public. Les missions et le fonctionnement de ces maisons sont par ailleurs précisés par la loi qui modifie dans ce but la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
De nouvelles compétences obligatoires sont également reconnues aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération.
La loi modifie, d’abord, la définition légale de la compétence « développement économique » en supprimant l’intérêt communautaire pour les actions de développement économique et les zones d’activité économique. Seul le « soutien aux activités commerciales » reste soumis à l’intérêt communautaire. La promotion du tourisme devient une composante de la compétence à part entière, avec la possibilité de créer un office de tourisme, le code du tourisme étant modifié en conséquence (articles L. 133-1 et L. 134-1 et suivants du Code du tourisme).
La gestion des aires d’accueil des gens du voyage, la collecte et le traitement des déchets ménagers et assimilés de même que l’eau et l’assainissement (à compter du 1er janvier 2020 pour ces deux derniers domaines par ailleurs préalablement modifiés dans leur contenu) ont également vocation à être exercés à titre obligatoire par les communautés de communes et communautés d’agglomération.
On indiquera enfin que l’article 68 de la loi offre aux EPCI un délai pour se mettre en conformité avec les nouvelles dispositions relatives à leurs compétences, dans une formulation non dépourvue d’ambiguïté : en particulier, le texte concerne-t-il toutes les compétences ? Si oui, pourquoi contraindre à l’engagement d’une procédure de modification statutaire pour les compétences obligatoires ? Ce délai est fixé au 1er janvier 2018 s’agissant de l’eau et de l’assainissement et au 1er janvier 2017 pour les autres compétences.
On notera ici une contradiction entre, d’une part, les articles 64 et 66, qui prévoient un transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » au 1er janvier 2020, et, d’autre part, l’article 68 qui impose une « mise en conformité » avant le 1er janvier 2018.

Les modifications législatives portant sur l’exercice des compétences des EPCI de manière plus générale

De manière plus globale, la loi procède à des modifications qui ont vocation à s’appliquer à l’ensemble des EPCI à fiscalité propre :
  • le report au 1er janvier 2018 du transfert de la compétence « gestion des milieux aquatiques et prévention contre les inondations » mentionnée à l’article L. 211-7 du Code de l’environnement ;
  • des règles spécifiques s’agissant des impacts sur les syndicats lors du transfert des compétences eau et assainissement à un EPCI à fiscalité propre : le transfert de ces compétences, devenues obligatoires pour l’ensemble des EPCI à fiscalité propre, aurait dû entraîner en cas de chevauchement des périmètre, selon les principes de droit commun, la substitution de l’EPCI au syndicat pour les communautés de communes et le retrait des communes de ce syndicat pour les autres EPCI à fiscalité propre ; or la loi institue un régime dérogatoire de représentation-substitution des EPCI à fiscalité propre en lieu et place de leurs communes lorsque le syndicat concerné regroupe des communes appartenant à trois EPCI à fiscalité propre au moins à la date du transfert. Le Préfet peut néanmoins autoriser l’intercommunalité à se retirer, après avis de la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI);
  • la simplification de l’exercice de la compétence en matière de PLUet la suppression du principe suivant lequel le périmètre d’un SCOT ne peut correspondre à celui d’un seul EPCI (l’article L. 122-3 du Code de l’urbanisme) ;
  • la substitution du président d’un EPCI à fiscalité propre dans tous les actes du maire, à la date du transfert, dans les domaines se rapportant aux pouvoirs de police transférés ;
De manière plus spécifique, on notera encore :
  • les précisions apportées à l’article L. 5217-7 du CGCT concernant les modalités de substitution des métropoles au sein des syndicats;
  • l’obligation pour les membres d’un syndicat mixte fermé de se prononcer sur un transfert de compétence dans le délai de trois mois, lorsque la possibilité d’un silence valant avis favorable est envisagé pour les EPCI ;

Les évolutions relatives aux métropoles

Au titre des modifications d’envergure, on mentionnera naturellement les importantes évolutions apportées au régime de la Métropole du Grand Paris par l’article 59 de la loi notamment.
Outre que son périmètre est encore susceptible d’évolution (avec l’intégration de la notion de communes membres d’un EPCI comportant des infrastructures aéroportuaires), la Métropole a également son champ d’intervention remanié : certaines de ses compétences sont ainsi ajustées, avec l’introduction de la notion d’intérêt métropolitain (pour les actions de restructuration urbaine, l’amélioration du parc immobilier bâti, la réhabilitation et la résorption de l’habitat insalubre) ; à cela s’ajoute le report de l’exercice des compétences aménagement et habitat au 1er janvier 2017.
Surtout, les « territoires », qui composent la Métropole sont remplacés par les « établissements publics territoriaux », entités d’au moins 300.000 habitants gérées par un conseil de territoire, disposant de la personnalité morale et de compétences propres. Parmi ces compétences, on peut distinguer :
  • celles qui lui sont attribuées de plein droit par la loi, dont l’eau, l’assainissement et les déchets ; précisons également que les EPT ont en outre vocation à établir leur PLUI (quand la MGP élabore le SCOT) et à devenir collectivité de rattachement des offices publics de l’habitat communaux et intercommunaux
  • celles que la Métropole n’a pas reconnu d’intérêt métropolitain
  • celles qui étaient exercées par les anciens EPCI à fiscalité propre situés sur le périmètre métropolitain.
L’introduction d’un nouveau mode de désignation des conseillers métropolitain a, ainsi que cela a pu être précédemment évoqué, fait l’objet d’une censure de la part du conseil constitutionnel.
Il conviendra encore de préciser qu’une série de dispositions a été adopté visant à faciliter la mise en place de la Métropole Aix-Marseille-Provence (voir notamment articles 50 à 56 et article 87).
Les métropoles de droit commune ne font pas l’objet d’une refonte, puisque tel avait été déjà l’objectif de la loi Maptam, on relèvera néanmoins, parmi les amendements apportés, une refonte du IV de l’article L. 5217-2 – inapplicable à la Métropole du Grand Paris – consacré aux délégations et transferts de compétences du département vers les métropoles (v. art. 90 de la loi).

Nouveautés en matière de mutualisation

Situation des personnels en cas de transfert ou de restitution d’une compétence entre communes et EPCI

L’article L. 5211-4-1 du CGCT qui règle la situation des agents participant à l’exercice des compétences communales transférées aux EPCI est complété à deux égards.
Dans le cadre des transferts de compétences des communes vers l’EPCI, l’information des personnels concernés est améliorée par l’obligation d’établir, préalablement à la décision portant transfert des personnels, une fiche d’impact. Cette fiche d’impact (que l’on connaissait d’ores et déjà pour les services communs) a pour objet de décrire les effets du transfert sur l’organisation et les conditions de travail, ainsi que sur la rémunération et les droits acquis des fonctionnaires et des agents non titulaires concernés. Elle doit être annexée à la délibération portant sur les modalités du transfert et est soumise à l’avis du ou des comités techniques compétents (la délibération portant sur les modalités du transfert et ses annexes sont soumises aux comités techniques pour avis).
Par ailleurs, il est inséré un IV bis qui vient remédier au vide juridique existant en cas de restitution de compétences. En effet, jusqu’à présent rien n’était prévu quant au sort des agents dans une telle hypothèse, le Conseil d’Etat ayant d’ailleurs eu l’occasion de mettre en exergue cette lacune du texte (CE, 5 juillet 2013, Commune de Ligugé).
Le nouveau dispositif pallie ce manque et fixe les principes applicables, en distinguant les agents mis à disposition d’abord (fin de la mise à disposition), les agents recrutés par l’EPCI ou transférés par les communes mais exerçant en totalité leurs missions au titre d’une compétence restituée ensuite (répartition entre commune et EPCI), et ceux, recrutés ou transférés mais n’exerçant leurs missions que pour partie sur une compétence restituée (nouvelle affectation au sein de l’EPCI).

Simplification de la mise en place de services communs entre EPCI et communes

Le dispositif des services communs a été modifié dans le but d’en simplifier les règles de mise en place et de gestion.
Le champ des personnes publiques locales susceptibles d’y recourir est élargi. La mise en place de services communs peut ainsi s’effectuer entre un EPCI et une ou plusieurs de ses communes membres ainsi qu’entre un EPCI et « un ou plusieurs des établissements publics rattachés à un ou plusieurs d’entre eux ».
S’agissant de la nature des services pouvant être mis en commun, la formulation est désormais plus large car elle recouvre l’ensemble des « missions opérationnelles ou fonctionnelles », la liste préexistante de ces missions ayant été supprimée, étant toutefois précisé que deux exceptions demeurent :
  • les missions dévolues aux centres départementaux de gestion de la fonction publique territoriale ;
  • les emplois de cabinet (qui ne relèvent pas d’un service de l’administration de la collectivité en tant que tel puisqu’ils sont régis par des dispositions spécifiques).
Par ailleurs, si le principe reste celui d’une gestion du service commun par l’EPCI, les dispositions modifiées de l’article L. 5211-4-2 du CGCT ouvrent dans tous les EPCI la possibilité, pour le conseil communautaire ou métropolitain, de choisir une commune pour assurer cette gestion.
Enfin, le même article L. 5211-4-2 est complété sur les modalités de mise à disposition des agents remplissant pour partie seulement leurs fonctions dans des services communs, le silence du texte ayant conduit à un alourdissement de la procédure applicable (mise à disposition individuelle nécessitant l’accord de l’agent). Le principe est désormais celui d’une mise à disposition de plein droit.

Extension des possibilités de recours au conventionnement entre personnes publiques

Sur ce point, on relèvera notamment que la possibilité d’une coopération horizontale est affirmée entre les communes membres d’un même EPCI à la condition que le rapport relatif aux mutualisations de services, défini à l’article L. 5211-39-1 du CGCT (relatif au schéma de mutualisation), le prévoit (articles L. 5111-1 et L. 5111-1-1 du CGCT).

Amélioration de la transparence de la vie publique et dispositions diverses de facilitation de la gestion des Collectivités territoriales

Transparence et responsabilité financière des collectivités territoriales

Le titre IV de la loi consacré à la transparence et à la responsabilité financière des collectivités territoriales renforce un certain nombre d’obligations de ces dernières en la matière.
On constate d’abord un renforcement de la publicité et du contrôle des juridictions financières puisque, dorénavant, les avis formulées par la CRC et les arrêts pris par le préfet, sont rendus immédiatement publics, et ce, sans même attendre la réunion des assemblées délibérantes concernées (article L. 1612-19 du CGCT).
En outre, les collectivités concernées devront entreprendre des actions correctrices pour répondre au rapport d’observations définitives transmis par la CRC et présenter le bilan de ces actions dans un délai d’un an à leur assemblée délibérante (article L.243-7 du Code des juridictions financières).
Par ailleurs, la loi rend obligatoire pour les exécutifs des communes de plus de 3.500 habitants, des départements, des régions, et des EPCI de plus de 10 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 3500 habitants, la présentation d’un rapport d’orientation budgétaire (ROB) à l’assemblée dans les deux mois qui précèdent l’examen du budget. Il portera sur les orientations budgétaires de l’exercice, les engagements pluriannuels pris par la collectivité, ainsi que sur la structure et la gestion de la dette. Dans les communes de plus de 10.000 habitants, le rapport présentera également la structure et l’évolution des dépenses et des effectifs, informations qui feront l’objet d’une publication. La présentation de ce rapport par l’exécutif doit donner lieu à débat, dont il sera pris acte par une délibération spécifique.
En outre, une présentation brève et synthétique retraçant les informations financières essentielles est jointe au budget primitif et au compte administratif. L’ensemble des éléments précités devra être publié sur le site internet de la collectivité lorsqu’il existe.
L’exécutif devra également présenter à l’assemblée délibérante une étude d’impact pluriannuelle sur les dépenses de fonctionnement pour toute opération exceptionnelle d’investissement dont le montant sera supérieur à un seuil fixé par décret, en fonction de la catégorie et de la population de la collectivité ou de l’établissement. Il en sera de même pour la région ou le département qui souhaiterait attribuer une subvention d’investissement.
S’agissant des aspects numériques, dans un délai de cinq ans suivant la promulgation de la loi, les collectivités territoriales et EPCI à fiscalité propre de plus de 50.000 habitants devront transmettre au représentant de l’Etat leurs documents budgétaires par voie numérique.
Les collectivités, certains EPCI et organismes publics devront transmettre au comptable public, sous forme dématérialisée, les pièces nécessaires à l’exécution de leurs dépenses et de leurs recettes (modalités fixés par décret).
Le code des juridiction financières prévoit désormais que la Cour des comptes devra établir un rapport annuel sur la situation financière et la gestion des Comptes et de leurs établissements publics.
En outre, la loi ouvre la possibilité aux collectivités territoriales et à leur groupement de se porter candidates, à une expérimentation qui devra conduire à la mise en place de la certification des comptes du secteur public local.
Vers un renforcement de la responsabilité financière des collectivités territoriales
S’agissant du renforcement de la responsabilité financière des collectivités territoriales, il est à noter qu’une action récursoire pourra être formée contre les collectivités territoriales, leurs groupements et établissements publics concernés dans le cas d’une condamnation par la CJUE pour manquement. Ces dépenses seront obligatoires pour les collectivités et leurs groupements au sens de l’article L 1612-15 du CGCT, elles pourront être modulées dans le temps ou faire l’objet d’un abattement total ou partiel pour les collectivités confrontées à une situation financière dégradée.
On notera enfin que l’observatoire des finances locales devient l’observatoire des finances et de la gestion publique locale, de nouvelles missions lui sont confiées.

Transparence et démocratie locale

Les mesures visant à accroitre la transparence et à renforcer le fonctionnement démocratique des collectivités territoriales en ce qu’elles ne constituent pas le cœur de la réforme territoriale sont en général moins connues.
Ces dispositions nouvelles, sans véritable lien les unissant, sont disséminées dans ce texte.
Elles n’en sont pas moins porteuses, pour certaines d’entre elles au moins, de modifications sensibles pour les collectivités territoriales à qui elles s’appliquent.
Pour les énumérer sommairement, on peut noter :
  • le renforcement des pouvoirs et mission des conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux (CESER), instance représentative de la société civile à l’échelle régionale ;
  • l’inscription obligatoire des droits des groupes d’opposition au sein des règlements intérieurs des conseils départementaux et régionaux ;
  • l’application dans les communes de plus de 1 000 habitants, contre 3 500 habitants aujourd’hui, de certains droits de l’opposition qui ne lui étaient pas encore reconnus, en dépit de l’évolution du mode de scrutin intervenue dans ces communes : tribunes libres dans le bulletin municipal de l’opposition, demande de convocation d’une assemblée délibérante par un tiers de membres du conseil municipal, adoption d’un règlement intérieur;
  • l’inscription expresse dans la loi de la possibilité de l’envoi des convocations aux séances du conseil municipal ainsi que des documents qui y sont attachés par la voie dématérialisée;
  • l’obligation nouvelle d’affichage à la mairie, dans un délai d’une semaine, du compte-rendu des séances du conseil municipal et sa publication sur le site internet de la commune s’il existe ;
  • l’obligation pour les collectivités territoriales de plus de 3 500 habitants de mettre en ligne sur leur site internet les informations publiques lorsqu’elles existent sous format numérique.

Fonctionnement des collectivités territoriales et des groupements

De la même façon, de manière éparse, le texte contient un certain nombre de dispositions intéressant le fonctionnement des collectivités territoriales.
Sans en présenter les détails, en voici la teneur générale.
Il doit tout d’abord être noté qu’il a été intégré dans la loi les dispositions inscrites dans la proposition de loi relative à la simplification du fonctionnement des collectivités territoriales, qui avait été adoptée en première lecture par les deux chambres mais n’avait pas terminé son processus législatif.
Afin de corriger ce qui semblait être une lacune de la loi, il a également été permis à l’organe délibérant dès la séance d’installation des conseils départementaux et régionaux de déléguer au Président de l’exécutif nouvellement élu la compétence pour ester en justice au nom de la collectivité.
On relèvera par ailleurs l’obligation faite aux communes, EPCI, départements et régions membres d’un syndicat, de désigner leurs représentants au comité parmi les élus composant leurs organes délibérants.
La création d’un centre communal d’action sociale dans les communes de moins de 1500 habitants devient en outre facultative.
La loi prévoit encore que soit porté de 45 à 75 % des indemnités de remboursement anticipé le montant maximal de l’aide pouvant être accordée aux collectivités ayant souscrit à des emprunts structurés dits toxiques.
Notons enfin, qu’il a été inscrit à l’article 133 de la loi le principe d’ouverture à compensation financière des compétences transférées en application de la présente loi ainsi que ses modalités d’exécution.


RÉFÉRENCES


source : http://www.lagazettedescommunes.com/391310/decryptage-de-la-loi-notre/