Les présidents des régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées se retrouvent ce lundi midi dans un restaurant de Collioure. Un déjeuner au sommet longtemps tenu secret.
Damien Alary nous l'avait annoncé le jour même du vote définitif de la loi sur la réforme territoriale consacrant la création de 13 grandes régions : "Mon collègue de Midi-Pyrénées, Martin Malvy, et moi-même rencontrerons la presse d'ici la fin de l'année, voire au début de la prochaine". Ce sera chose faite aujourd'hui à midi et pas n'importe où : dans un des meilleurs restaurants de Collioure, "Le Neptune", dont la superbe terrasse s'ouvre sur les flots bleus de la Méditerranée et sur le célèbre fort des rois de Majorque immortalisé par tant de peintres.
Collioure : un lieu qui ne doit rien au hasard
Qui a pris l'initiative de la rencontre ? Disons qu'Alary a été le premier à parler du projet et que les deux hommes, venant de Montpellier et de Toulouse, ont accepté de faire chacun un bout de chemin pour se rencontrer. Pour que les mariages forcés aient quelques chances de réussir, il faut ménager les susceptibilités. Les modalités de cette rencontre ont été mûrement réfléchies. Le lieu d'abord : Collioure est sans doute l'un des décors les plus connus, les plus emblématiques de ce Languedoc-Roussillon qui va aux épousailles à reculons et où on cultive, sans doute à tort plus qu'à raison, le sentiment que celles-ci vont vite tourner au cocufiage. Que n'aurait-on dit si cette rencontre avait eu lieu de l'autre côté du seuil de Naurouze ? Collioure est aussi au cœur d'un pays catalan fier de sa culture ; un pays dont les élus, derrière l'ancien président du Languedoc-Roussillon Christian Bourquin, furent les plus réfractaires à la fusion. De son côté, en venant sur la côte d'Émeraude, le président de Midi-Pyrénées, souligne l'attachement qu'il porte à une ouverture maritime dont ne dispose pas sa région.
Un référendum pour le choix du nom de la future région
Selon nos confrères de Lindependant.fr, pour la dénomination de la future région, les chefs des exécutifs régionaux n'excluent pas une consultation de la population, sous forme de référendum si la loi le permet.
Un déjeuner tenu secret jusqu'au dernier moment
Les circonstances ensuite. Jusqu'au dernier moment, le déjeuner a été tenu secret. "Nous souhaitions que les deux présidents se rencontrent en tête à tête, sans personne d'autre autour", explique-t-on dans l'entourage de Damien Alary. En tête à tête et à armes égales... Le successeur de Christian Bourquin connaît bien son homologue. Les deux hommes sont socialistes et Martin Malvy vient de temps à autre à Nîmes où réside et travaille son fils architecte. Alary qui présida le conseil général du Gard avant d'accéder à la présidence du Languedoc-Roussillon, l'a parfois rencontré sur ses terres d'élection.
Vers une gouvernance partagée ?
Voilà donc qui devrait faciliter les échanges tout à l'heure entre la poire et le fromage dans les salons du "Neptune". Car les deux présidents, à ce qu'on dit, n'y seront pas seulement pour la photo. Chacun a apporté ses dossiers avec lui. Nul doute qu'ils évoqueront le vade-mecum de la fusion que la loi ne définit pas, laissant sa rédaction à l'initiative des élus. Sur ce point, Damien Alary a déjà pris une initiative. Lors de la session de son assemblée régionale, le 19 décembre, il a proposé une sorte de gouvernance partagée pour conduire les deux régions vers la fusion. Elle comporte cinq niveaux. Le premier est la "conférence des présidents". Composée des deux chefs des exécutifs, de leurs directeurs généraux des services et de leurs chefs de cabinet, elle pourrait être mise en place dans les toutes prochaines semaines. Suivraient une "commission mixte des vice-présidents", une "commission de pilotage technique" et une "commission mixte territoriale" où seraient représentés les exécutifs de toutes les collectivités territoriales du nouveau périmètre : Régions, Départements, Métropoles et Agglomérations. Comme l'a affirmé Damien Alary avant même le vote de la loi : le Languedoc-Roussillon ne veut pas être à la remorque de Midi-Pyrénées dans la marche vers l'union. Il serait tout de même paradoxal qu'il apparaisse comme le premier artisan de la fusion après l'avoir si longtemps refusée.
JEAN-PIERRE LACAN Midi Libre
